« Dans un Etat de droit, tout le monde doit se conformer à la loi », dit le Commissaire LUIS CARRILHO

10 sept 2016

« Dans un Etat de droit, tout le monde doit se conformer à la loi », dit le Commissaire LUIS CARRILHO

Deux années sont passées depuis que le Commissaire Luis Carrilho a foulé la terre centrafricaine, le 13 septembre 2014, en tant que Chef de la Police de la MINUSCA. Dans une période de forte incertitude, qui contraste, à bien des égards, avec le paysage sécuritaire d’aujourd’hui. Le chemin aura été long, jalonné d’embuches. Mais le résultat est tout aussi gratifiant. En fin de mission, il a bien voulu se confier à GUIRA FM et « MINUSCA en Action », du Bureau de la Communication et de l’Information publique de la MINUSCA. Il revient sur des moments clef de son mandat, évoque des défis, des acquis et des chantiers inachevés, se réjouit de la collaboration avec les forces de sécurité intérieures, salue le travail des autorités nationales et livre ses espérances pour la Centrafrique…

BCIP : Commissaire, vous arrivez au terme de votre mission à la MINUSCA  en tant que chef de la Police de cette mission, quel bilan pouvez-vous faire de votre action ?

LUIS CARRILHO : Le bilan est positif. Quand on compare la Centrafrique de 2014 à celle d’aujourd’hui, la MINUSCA doit être fière du travail accompli. Et moi, en tant que policier, donc responsable de la sécurité à côté des forces locales chargées de cette même sécurité, je suis fier du travail réalisé par les policières et policiers de la MINUSCA  dont j’ai eu l’honneur de superviser le travail sur le terrain. La feuille de route établie de commun accord avec les autorités centrafricaines a été positive. L’on est parti des consultations populaires à la base jusqu’au Forum de Bangui, puis il y a eu le referendum constitutionnel et le premier et deuxième tour des élections législatives et présidentielles. Tout ceci dans un climat de sécurité  appréciable, en dépit de quelques incident ici et là.

Quoi qu’on dise, la question de la sécurité en Centrafrique reste toujours préoccupante ; n’avez-vous pas un sentiment d’insatisfaction à ce niveau ?

En termes de sécurité, il y a toujours des défis à relever. Même dans les pays les plus stables du monde, de sérieux défis de sécurité se posent. Mais ils doivent être la première préoccupation des sociétés car sans sécurité, il n’y a pas de développement et il n y a pas d’épanouissement. La MINUSCA fait des efforts considérables, aux côtés des forces de sécurité intérieure de la Centrafrique pour  améliorer un climat de sécurité qui comporte encore de nombreux motifs de préoccupations. Nous avons fait ce que nous devrions et pouvions faire, mais il reste encore beaucoup de chantiers inachevés.

Dans le même ordre d’idées quels sont les défis sur le terrain qui vous ont paru insurmontables et quels sont vos motifs de satisfaction ?

L’une des difficultés, c’est la réconciliation nationale, mais l’ensemble de la communauté nationale semble si fortement engagé dans le processus qu’il n y a pas de raison de douter que cette difficulté va être surmontée.

L’opinion centrafricaine reproche souvent à la MINUSCA  de se fixer elle-même des zones interdites et de laisser ainsi se développer des zones de non-droit. Qu’en pensez-vous ?

Dans un Etat de droit, tout le monde doit se conformer à la loi. Le fait que nous avons une mission des Nations Unies en Centrafrique est le signe que quelque chose n’a pas fonctionné et qu’’il faut réparer. C’est pour cela que nous sommes ici.  Au plan sécuritaire, le travail est énorme. Nous apportons notre contribution au retour de la sécurité et de la libre circulation des personnes et des biens. La police de proximité pour laquelle nous œuvrons fonctionne partout à Bangui et les autorités s’y investissent beaucoup. Il n y a pas de zones interdites, il y a simplement des endroits où nous ne sommes pas encore ou toujours  parce que l’Etat lui-même n’y est pas présent, et c’est ainsi que d’autres groupes  y font leurs lois. La Police nationale et la MINUSCA doivent être massivement présentes partout, et ce n’est pas encore le cas, mais les choses se font progressivement. Ce que nous souhaitons de tout nouveau, c’est une présence plus accrue des forces de sécurité partout sur le territoire mais aussi et surtout que la chaine de justice fonctionne afin que les hors-la-loi puissent rendre compte de leurs forfaits. C’est aussi comme cela que la sécurité prendra son sens.

Commissaire, en observant la Centrafrique d’aujourd’hui, quel est le sentiment qui vous anime entre l’optimisme et le pessimisme ?

Sans hésitation, l’optimisme. Les autorités démocratiquement élues et celles de la Transition ont fait un travail remarquable dans le retour à la paix civile. L’investissement de la communauté internationale a été par ailleurs déterminante dans ce retour progressif à la paix que nous observons. Aujourd’hui les activités économiques ont repris et les centrafricains  vivent presque normalement leur quotidien. Si chacun continue de jouer sa partition nous auront des résultats très positifs.

Quel message souhaiteriez-vous adresser aux Centrafricains ?

Un seul mot : Courage. Je leur dit « courage ! » car ils sont sur la bonne voie. Et la communauté internationale les accompagne et continuera de les accompagner dans leur désir de paix et dans leurs espoirs de développement.

Vos projets pour l’avenir, Commissaire…

Je suis un policier du Portugal. Dans l’immédiat, je retourne dans mon pays pour me remettre à la disposition de mes autorités. J’ai vécu une expérience formidable en servant sous le drapeau des Nations Unies et en ayant eu l’opportunité de servir et d’apprendre. C’est une chance inestimable et mon souhait est de pouvoir renouveler cette expérience au service des Nations Unies.