Non à la justice populaire et à la violence liée aux accusations de sorcellerie !

19 août 2016

Non à la justice populaire et à la violence liée aux accusations de sorcellerie !

Une campagne de sensibilisation contre les violences liées aux accusations de sorcellerie a été lancée ce jeudi 18 août 2016, à Kaga-Bandoro. Cette campagne initiée par la section des Affaires judiciaires et pénitentiaires, avec l’appui des Sections Droits de l’Homme et Protection de l’Enfant de la MINUSCA, vise à lutter contre les violences subies par les présumés « sorciers »,  et contre la justice populaire en général. En effet, depuis janvier 2015, L’ONG INTERSOS, partenaire de cette campagne, a enregistré 64 cas d’accusation de sorcellerie qui ont abouti à des violences contre les auteurs présumés. Selon Credo Makela, qui s’occupe du monitoring de protection au sein d’INTERSOS, parmi les cas enregistrés, 24 personnes ont été sauvagement tuées et 6 autres ont été enterrées vivantes. A l’en croire, il y aurait de nombreux autres cas qui n’ont pas été enregistrés, mais qui ont  été commis avec autant de cruauté.

R. M une femme déplacée originaire de Mbres, a raconté au cours de la séance de sensibilisation que c’est ainsi qu’elle a perdu sa petite sœur. Cette dernière, qui était mère de 4 enfants a été tuée par une foule de personnes qui l’accusait de sorcellerie. Selon Mme Malessara, si cela peut arriver à tout le monde, ce sont les vieilles femmes qui n’ont pas d’enfants qui se voient le plus souvent livrées à la vindicte populaire, suite à de telles accusations. « Lorsqu’une vieille femme n’a pas d’enfant, elle est souvent exposée au risque d’être accusée de sorcellerie. Parfois, les jeunes simulent des maladies et accusent à tort de vieilles femmes innocentes de les avoir ensorcelés, pour ensuite les livrer à la justice populaire », a-t-elle expliqué les larmes aux yeux.

INTERSOS souligne qu’il y a divers facteurs qui expliquent cette situation. Tout d’abord, les coutumes et traditions locales légitiment la justice populaire contre les présumés coupables. Ensuite, la faiblesse, voire tout simplement l’absence, du système judiciaire et pénitentiaire, notamment dans les zones sous occupation des groupes armés est un autre facteur qui favorise le phénomène. Enfin, il y a la pénalisation des pratiques de sorcelleries et de charlatanisme dans la législation nationale qui encourage la violence de la société contre les personnes accusées de ces pratiques.

A travers la campagne de sensibilisation en cours, la MINUSCA cherche à favoriser un changement de mentalités et de comportements des citoyens sur cette question. Les autorités locales, notamment les chefs de villages et de quartier ont favorablement accueilli cette initiative dont ils encouragent la poursuite à travers tous les quartiers et villages. Jean-Claude Kossingou, chef de quartier de Tipoyeur, s’est félicité du choix porté sur son quartier pour la séance de sensibilisation tenue l’après-midi du 18 août 2016, tout en appelant à ce que  la MINUSCA continue cette sensibilisation en formant les jeunes des quartiers pour qu’ils poursuivent l’activité. « Il faut former des agents communautaires de sensibilisation, au moins un homme et une femme pour chaque quartier afin qu’ils continuent la sensibilisation, qui finira par porter des fruits si elle est faite de manière durable », a-t-il conclu.

Au cours de la séance organisée dans le premier arrondissement de Kaga-Bandoro dans la matinée du 18 août, il y avait 86 participants, dont 42 femmes et 44 hommes.

Le représentant du Bureau de la Communication et de l’Information publique a profité de cette séance de sensibilisation pour évoquer le nouveau mandat de la Mission, en mettant l’accent sur l’objectif stratégique de réduction de la présence et de la menace que constituent les groupes armés, ainsi que l’importance de la restauration de l’autorité de l’Etat et du respect de l’Etat de droit. La MINUSCA et INTERSOS vont poursuivre la sensibilisation sur la lutte contre la justice populaire et la violence liée aux accusations de sorcellerie dans tous les arrondissements de Kaga-Bandoro et plus tard dans les autres villes et villages des préfectures de Nana-Gribizi et Kemo.