Questions les plus fréquemment posées​

Que veut dire déontologie et discipline ?

Le personnel des Nations Unies, civil ou militaire, est tenu de respecter un code de conduite et de se conformer aux lois en vigueur dans leur lieu d’affectation. En outre, ils doivent se comporter de manière respectueuse et digne envers la population locale. Au sein de la MINUSCA, comme dans chacune des missions des Nations Unies sur le terrain, il existe une équipe de Déontologie et de Discipline  chargée de veiller au respect des normes de conduite telles que prescrites par les Nations Unies. Toute infraction aux normes constitue une “faute de conduite”, parfois qualifiée de “faute grave”. Pour toute infraction commise, l’individu sera tenu responsable et sanctionné par le biais de mécanismes administratifs établis. Les sanctions incluent : réprimande écrite ou verbale, recouvrement de sommes dues à l’Organisation, mise en congé administratif, rapatriement, etc. Ces processus font tous partie de la « Déontologie et discipline ».

Quelles sont les fautes les plus graves ? Que risquent les contrevenants ?

Les fautes les plus graves sont celles qui sont de nature à entraver l’exécution du mandat de la mission et qui portent notamment atteinte à la dignité et à l’intégrité physique des personnes vulnérables. Les actes d’exploitation et abus sexuels en sont une illustration. Toute faute grave fera l’objet d’une enquête par OIOS et/ou en collaboration avec OIOS. Les auteurs de fautes graves risquent : licenciement avec ou sans préavis, mesures disciplinaires internes (ONU et/ou dans le pays), non éligibilité pour les futures missions de l’ONU, rapatriement et éventuelles poursuites pénales dans leur pays d’origine.

Quelle est la différence entre abus sexuels et exploitations sexuelles ?

L’abus sexuel est tout contact de nature sexuelle imposée par la force sous la contrainte ou à la faveur d’un rapport inégal. La menace d’un tel acte constitue aussi un abus sexuel. Tout rapport sexuel avec un mineur est considéré comme un abus sexuel. L’exploitation sexuelle est le fait d’abuser ou tenter d’abuser d’une situation de vulnérabilité, d’une position d’autorité ou de rapports de confiance à des fins sexuelles. Profiter de son statut, de son pouvoir, de son rang, de son argent ou échanger de la nourriture, des cadeaux, de l’argent, ou des services contre des faveurs sexuelles constitue une exploitation sexuelle. 

Pourquoi et comment CDT se focalise sur les actes d’EAS ?

Loin d’être l’apanage de la RCA, les actes d’exploitation et abus sexuels  sont un enjeu mondial, qui frappe toutes les couches sociales, y compris les soldats de la paix. Au  niveau de la MINUSCA,  notre préoccupation est de faire en sorte que les casques bleus aient un comportement exemplaire en la matière et nous sensibilisons leur entourage sur les normes de conduite attendues. Nos sessions de sensibilisation incluent des définitions de ce qui constitue un acte d’EAS et autres fautes graves (peu importe l’identité de l’auteur des faits allégués). Si une norme de conduite n’a pas été respectée, CDT explique aussi aux participants comment utiliser les mécanismes de dénonciation mis à leur disposition.

Combien de cas d’actes d’EAS ou de fautes graves la MINUSCA a-t-elle recensé depuis le début de la Mission ?

A ce jour, la MINUSCA a déjà enregistré 112 allégations d’actes d’EAS et 272 allégations de fautes de conduite. Au total, les allégations d’actes d’EAS ont identifié 112 auteurs présumés et 145 victimes présumées. La majorité des allégations d’EAS concernent des incidents ayant eu lieu il y a un an ou plus. Pour obtenir plus de données sur les actes d’EAS et fautes de conduite pour toutes les missions de maintien de la paix des Nations Unies, consulter le site de l'Unité de Déontologie et Discipline à New York (CDU).

Que signifie une fausse allégation ?

Une fausse allégation est une allégation qui n’a pas été établie au terme d’une enquête ou a été faite de manière calomnieuse dans le but de nuire ou d’en tirer profit. Quelqu’un peut dire qu’il ou elle a été victime, ou dénoncer un acte commis sur une tierce personne, sans que cela ne soit vrai. C’est la raison pour laquelle des enquêtes minutieuses, et parfois longues, sont obligatoires afin d’établir les faits. Durant ces enquêtes, aussi bien les droits de la victime que ceux de l’auteur présumé doivent être préservés, et notamment celui à la présomption d’innocence. Une fausse allégation est différente d’une allégation non fondée, qui, elle, ne sous-entend pas forcément l’existence d’une intention de nuire de la part de la personne signalant l’allégation (voir la question suivante).

Que signifie une allégation non fondée ?

Une allégation non fondée est une allégation dans laquelle l’insuffisance de preuves disponibles a empêché la finalisation de l’enquête, ou lorsque l’on n’est pas arrivé à établir qu’un acte d’EAS avait eu lieu. Une preuve peut être, entre autres, des témoignages à l’oral par des témoins, y compris des experts techniques, des documents électroniques, audio, des vidéos ou photos, des indices de nature biologique, tel du sang, des cheveux ou du sperme. Avant toute enquête sur une allégation, des preuves prima facie doivent être rassemblées au cours d’une mission préliminaire d’établissement des faits. Les preuves prima facie correspondent à des preuves crédibles et qui permettent de façon suffisante d’identifier les victimes potentielles et fautes de conduite ou fautes graves commises par un ou plusieurs membres d’un contingent national spécifique. Il n’y a pas de formule spécifique pouvant déterminer ce qui sera considéré ou non comme preuve prima facie pour un cas particulier. La décision finale en ce qui concerne l’existence de preuves crédibles sera prise par le siège de l’ONU, une fois l’ensemble des cas revus.

Que risquent les auteurs de fausses allégations ?

Les fausses allégations sont prises très au sérieux. Non seulement elles portent préjudice aux  personnes qui en font l’objet, et qui peuvent se retourner contre l’accusateur, mais elles entachent l’image de toute une mission, des Nations Unies et du pays dont la personne est ressortissante. Si les fausses accusations sont publiques, et émanent de membres de la population locale, ceux-ci peuvent être poursuivis pour diffamation devant les juridictions nationales du pays hôte. Si les auteurs de fausses allégations sont membres du personnel des Nations Unies, ces derniers s’exposent à des enquêtes et à des sanctions subséquentes.

Qui est en charge des  enquêtes ?

Le Bureau de contrôle des services internes (BCSI) est l’entité indépendante chargée d’aider le Secrétaire Général à s’acquitter de sa responsabilité de supervision des ressources humaines et matérielles, par le biais d’audits internes, suivis, inspections, évaluations et services d’enquête. Toute enquête à l’encontre d’un membre du personnel suspecté d’avoir violé les normes de l’ONU se déroule selon un ensemble de procédures administratives et disciplinaires établies. Ces procédures commencent par la catégorisation des allégations en fonction de leur gravité. Les allégations les plus graves sont dénommées allégations de Catégorie 1, et celles moins graves, Catégorie 2. En principe, le BSCI enquête sur toutes les allégations de Catégorie 1 impliquant des membres du personnel civil ou policier. Pour les membres de contingents militaires ou observateurs militaires, le BSCI ne peut enquêter que si l’état membre concerné n’a pas désigné un enquêteur national dans les délais impartis,  ou si l’état membre concerné demande une enquête conjointe. Le BSCI peut aussi référer certaines allégations de Catégorie 1 à la mission, préférant, en pratique, se focaliser sur les allégations d’EAS impliquant des mineurs. Au regard des allégations de catégorie 2, les enquêtes sont menées par l’Unité des enquêtes spéciales (SIU, section de la sécurité) et/ou l’Unité des enquêtes internes (IIU, composante de la police).

Des investigations ont elles abouti? Des casques bleus/contingents ont-ils déjà été sanctionnés ?

Certaines enquêtes ont abouti. Les auteurs des allégations fondées sont toujours sanctionnés par les Nations Unies et, parfois, également par leur pays d’origine. Par exemple, le rapport d’enquête du BSCI sur les multiples allégations d’exploitation et d’abus sexuel à Dekoa a identifié, comme présumés auteurs, 16 membres du contingent militaire Gabonais et 25 membres du contingent militaire Burundais. Aucun des membres identifiés des contingents militaires ne sera autorisé à participer aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies en cours et à venir. Selon les conclusions de enquêtes des états pourvoyeurs de troupes, qui sont toujours en cours, des sanctions pénales pourraient suivre, telles que leur radiation  de l’armée ou leur incarcération.

Comment l’ONU, et plus spécifiquement, la MINUSCA, prennent-elles en charge les victimes ?

Les victimes sont au centre des préoccupations de la MINUSCA. Elles sont systématiquement référées, par le biais des Agences des Nations Unies, pour une assistance psychosociale et médicale fournies par leurs partenaires de mise en œuvre. La MINUSCA échange régulièrement avec les agences en ce qui concerne le suivi de l’assistance aux victimes, tentant de mieux documenter les différents types d’assistance fournis à chaque individu. Un fond d’assistance aux victimes a également été mis en place, à New York, dans l’objectif de pallier les lacunes dans la prestation de services d’assistance aux victimes, quoique sans fournir des réparations financières individuelles. Enfin, un protocole d’assistance aux victimes d’exploitation et abus sexuels a été mis au point au niveau global, et en collaboration avec les agences onusiennes. Son but est de renforcer l’approche coordonnée et transversale de l’aide et du soutien apportés aux victimes, que ces abus soient commis par le personnel des ou en lien avec les Nations Unies, ou par des forces qui ne sont pas sous son commandement. Le protocole se fonde sur une approche centrée sur les victimes, et spécifique au contexte de la RCA, afin d’assurer l’apport d’aide et de soutien adéquats et en temps utiles.

Quelles mesures préventives la Mission a-t’elle prise pour éviter de nouveaux cas ?

Tout individu arrivant en RCA pour travailler avec la MINUSCA, qu’il soit civil, militaire ou policier, prend part à une formation préliminaire. Menée en partenariat avec IMTC, cette formation explique de manière claire toutes les règles et régulations de l’ONU aux nouveaux-venus. Des campagnes de sensibilisation internes sont aussi conduites régulièrement afin de s’assurer que ces informations ne soient pas oubliées. En attendant, des mesures sont également prises au plus haut niveau de la hiérarchie de la mission, telle la création d’Équipes conjointes de prévention d’EAS. Ces dernières mènent des patrouilles régulières et visitent régulièrement les camps afin de faire des évaluations de risques. En mars 2016, le Conseil de Sécurité de l’ONU a adopté une résolution afin de renforcer les sanctions à l’encontre des responsables d’actes d’exploitation et abus sexuels permettant, notamment, de « rapatrier une unité militaire ou une unité de police constituée d’un contingent lorsqu’il existe des preuves crédibles de cas répandus ou systématiques d’exploitation et d’atteintes sexuelles commis par cette unité ». Cette résolution met également l’accent sur la responsabilité des États pourvoyeurs de troupes. Désormais, le Secrétaire Général de l’ONU peut remplacer une unité entière, militaire ou policière, si le pays qui l’a envoyée sur le terrain n’a pas pris les mesures adéquates pour que les coupables répondent de leurs actes et soient sanctionnés. Enfin, une formation en ligne portant sur l’EAS a été publiée le 13 septembre par le siège de l’ONU. Cette formation sera obligatoire pour tout personnel civil et en uniforme, et comprend deux “modules” : un pour tout membre du personnel, et un spécifique aux responsables et commandants. Créée avec des fonds du gouvernement japonais, la formation vient en complément de celle censée être dispensée par les états membres in situ ou avant le déploiement de tout personnel civil ou en uniforme.

Quel est le rôle des pays pourvoyeurs de troupes en matière de sensibilisation et  d’enquêtes ?

Avant leur déploiement, les troupes des pays pourvoyeurs font l’objet d’un recrutement sélectif et rigoureux qui met l’accent sur la moralité et la probité. Ces pays ont également un rôle fondamental dans la sensibilisation aux normes de conduite des Nations Unies et notamment à la politique de tolérance zéro vis à vis des actes d’exploitation et abus sexuels. A leur arrivée dans la mission, les membres des contingents militaires sont, une fois de plus, formés et sensibilisés au respect des normes de conduite des Nations Unies. Lorsqu’une allégation est portée à la connaissance de la mission, le pays d’origine de l’auteur présumé en est informé, et a le devoir de diligenter, dans les meilleurs délais, une enquête par ses experts nationaux. Enfin, lorsque la faute est établie, les autorités nationales doivent prendre les sanctions appropriées, contribuant ainsi au renforcement de la politique de tolérance zéro du Secrétaire Général des Nations Unies.

Quel rôle le gouvernement Centrafricain peut-il jouer dans la lutte contre les actes d’EAS et les fautes de conduite ?

Le gouvernement Centrafricain joue aussi un rôle dans la lutte contre les actes d’EAS, par le biais d’un programme plus général portant sur la réduction de la violence basée sur le genre (VBG). Ce programme comprend des activités ciblées sur l’EAS, telle l’organisation de campagnes de sensibilisations, menées par des réseaux officieux de Maires, soulignant aux populations l’importance de signaler les actes d’EAS. D’autres activités ciblent l’EAS au travers d’un cadre plus large autour de la VBG, tels les efforts du Ministère des Affaires sociales en matière de regroupement des différents mécanismes de coordination sur la VBG, afin de renforcer la prestation des services d’assistance. Certaines initiatives sont menées avec l’ONU, telle la création, en janvier 2015, d’UNMIRR (Unité mixte d’intervention rapide et de répression des violences sexuelles faites aux femmes et aux enfants). Le personnel d’UNMIRR est en train d’être formé, et devaient être opérationnels en février 2017. Une campagne importante de sensibilisation sur UNMIRR et leur numéro vert est en cours. D’autres exemples de coopération incluent le suivi de la protection des enfants et des jeunes par rapport aux actes d’exploitation et d’abus sexuels commis par leurs parents, ou la demande d’un meilleur accès à la justice pour les victimes, nonobstant l’identité de leur agresseur, et l’obtention d’aide et de soutien afin de limiter la stigmatisation. Ce dernier point est crucial, puisque toute stigmatisation constitue une double peine: celle de la violence subie et celle de l’exclusion sociale.

Quels seront les principaux obstacles auxquels CDT fera face dans les mois à venir?

Il reste plusieurs obstacles à surmonter afin que les normes de conduite et de discipline de l’ONU soient adéquatement respectées - et en cas d’infraction, résolues - pour toute catégorie du personnel. Ces obstacles sont déjà présents “à la maison”, c’est à dire dans les pays pourvoyeurs de troupes ou de membres de la police, qui sont censés assurer la formation adéquate en matière de conduite, et d’actes d’EAS, avant leur arrivée dans la mission. Les troupes déployées doivent aussi bénéficier de meilleurs équipements, conditions de vie et conditions sociales. Les enquêteurs nationaux doivent avoir les qualifications requises, y compris des compétences en matière d’enquête, et doter d’une forte expérience en audition des personnes vulnérables et victimes potentielles de violences sexuelles. A cet égard, des formations additionnelles portant sur les procédures de l’ONU, normes internationales d’enquête sur les victimes d’EAS, y compris les celles sur les mineurs, seront fournies par CDT, avec l’appui des sections de la Protection de l’enfance et de la Protection des femmes. Enfin, l’architecture actuelle a besoin d’être harmonisée, et ce en conjonction avec UNCT, les agences onusiennes et la communauté humanitaire en RCA, afin de mieux lutter contre les actes d’EAS, assurant ainsi une meilleure cohérence dans les activités et messages de plaidoyer, et le référencement rapide et systématique des victimes par le biais d’un mécanisme d’assistance existant.