Message du Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies en République centrafricaine à l’occasion de la Journée des droits de l’homme

11 déc 2020

Message du Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies en République centrafricaine à l’occasion de la Journée des droits de l’homme

Message du Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies en République centrafricaine, Chef de la MINUSCA, Mankeur Ndiaye, à l’occasion de la Journée des droits de l’homme, le 10 Décembre 2020

Ce 10 décembre 2020, le monde commémore le 72ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, désormais baptisé « Journée des droits de l’homme ».

Cette date est restée mémorable, car elle manifeste le triomphe de l’humanité sur l’adversité, le déni des droits en leur consacrant une reconnaissance universelle, malgré les différences de tous ordres : linguistique, de genre, de race, de nationalité…       

 La Déclaration universelle des droits de l’homme a parcouru un long chemin avant d'asseoir sa légitimité comme garant des droits de l'homme consacrés par la Charte de l’Organisation des Nations Unies.

Elle a servi de tremplin au développement progressif du droit international et sa codification de l’article 13 de la Charte des Nations Unies signée à San Francisco le 26 juin 1945. Elle a également servi d'élément moteur à la codification du pacte international relatif aux droits civils et politiques et de celui relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966 qui constituent à la fois la charpente du système onusien de promotion des droits de l’homme et le socle des régimes démocratiques.

 

Ce succès de la Déclaration universelle des droits de l’homme, dans son aspect de reconnaissance des droits et son actualité explique qu’au-delà de nos points de vue, de nos différences et divergences de tous ordres, l’humanité constitue notre dénominateur commun. Elle nous a permis, au niveau des Nations Unies, de bâtir une société basée sur le respect des droits et leur protection contre toutes velléités et déni, et de contribuer à travers nos actions, programmes et processus à son universalisation.

Ce succès rappelle aussi que l’acte fondateur des Nations Unies a été à la base d’une quête, sans précédent, de garanties de protection et de respect des droits de l’homme

Avec la Déclaration universelle des droits de l’homme, les États ont finalement admis que leur souveraineté implique l’obligation négative de ne pas violer les droits de l’homme sous aucun prétexte et celle d’en assurer une jouissance effective par tous. Ainsi, la protection des droits de l’homme constitue la clé de voûte du système de gouvernance mondiale que les Etats membres ambitionnent de rendre plus effective dans l’intérêt de la Paix universelle, de la Sécurité collective et du développement durable.

 

Cette année, la Journée de droits de l’homme est commémorée sous le thème « Reconstruire en mieux – Défendons les droits de l’homme ». Il s’agit d’une interpellation face aux nombreux défis de l’heure, en cette année 2020, où le monde a été comme rarement auparavant secoué dans son entièreté par un ennemi invisible, la pandémie de la COVID-19.

« Reconstruire en mieux » ce qui a été détruit par nos manquements ayant occasionné ce fléau nous renvoie au principe de solidarité internationale qui a présidé à la création de l’Organisation des Nations Unies, mais aussi à l’adoption de notre Déclaration universelle des droits de l’homme.  Un fléau qui a montré aux plus puissants comme aux plus faibles d’entre nous que nous partageons la terre comme propriété commune et que nous sommes liés par un destin commun qui devrait se manifester par la préservation de notre humanité plus que tout, de notre dignité d’êtres humains et de notre vulnérabilité face au non-respect de nos droits.

« Reconstruire en mieux » ce qui a été détruit par le déni des droits, ayant occasionné des conflits, l’irrespect des différences qui a engendré des crises, le déni d’humanité qui a relégué certains aux rangs de sous-hommes, dépourvus des moyens de vivre, de soins de santé primaires, d’éducation de base, de logis et même de vie.

« Reconstruire en mieux » par un renouvellement de notre engagement à remettre les droits de l’homme au centre de notre action, en tant que Nations Unies, mais aussi interpeller les États, y compris la République centrafricaine, à placer l’homme, sa liberté, son bien-être et ses aspirations au centre des préoccupations et des priorités de son action.

Défendre les droits en péril, que ce soit en réponse aux effets des catastrophes naturelles, comme la crise de la COVID-19, ou après les affres causées par l’homme comme les conflits et les violations auxquels font face les populations dans diverses contrées du monde, c’est notre devoir et notre Organisation a toujours placé cette préoccupation au centre de ses actions.

Mesdames et Messieurs,

Qu’il me soit permis à cette occasion de mettre en adéquation les droits de l’homme et la situation actuelle en République centrafricaine, puisque nous avons l’obligation d’exécuter un mandat qui devra se matérialiser par l’effectivité des droits de l’homme.

En effet, la Déclaration universelle des droits de l’homme offre une évidente actualité au contexte actuel en République centrafricaine.

Le contexte sociopolitique est présentement marqué par la préparation aux élections, la mise en œuvre des réformes importantes y compris dans le domaine de la lutte contre l’impunité à travers le processus de justice transitionnelle et l’adoption de la loi sur la liberté de communication qui vient consolider la démocratie. Ces situations sont évidemment liées à la protection et la promotion des droits de l’homme. En effet, le processus électoral que les Nations Unies, à travers la MINUSCA, soutiennent autant sur les plans technique, opérationnel, logistique, sécuritaire qu’à travers les bons offices, est un moment de manifestation de la volonté populaire, qui est l’émanation des choix individuels à travers le droit de vote, celui à l’éligibilité et des droits de l’homme.

Nous avons engagé plusieurs actions à cet effet qui ont pour objectif ultime la protection de l’intégrité du vote, la transparence des opérations et la prévention de la violence : les sensibilisations populaires pour inviter les citoyens centrafricains à participer massivement aux opérations électorales, y compris dans l’optique de promouvoir la tolérance, prévenir et combattre les discours de haine et d’incitation à la violence.

À l’aube de la campagne devant permettre la concrétisation du droit de participation politique des Centrafricains, un droit de l’homme, qu’il nous soit permis de rappeler à toutes les parties prenantes (partis politiques, société civile, institutions d’appui à la démocratie et populations) que la crédibilité du processus dépend de leur engagement à respecter la dignité humaine, les choix citoyens, à promouvoir la tolérance, à éviter les discours de haine et d’incitation à la violence et à s’engager  sur la voie de la paix au lendemain des élections. Nous prenons donc l’engagement de promouvoir les droits de l’homme et de consolider la démocratie au-delà des joutes électorales.

Ces élections offrent à la Nation centrafricaine une opportunité unique de préserver les acquis sécuritaires, de consolider la paix et de renouveler son contrat social dans l’intérêt d’une réconciliation nationale incarnée par des institutions fortes parce que légitimes. C’est le lieu pour moi de renouveler l’appel du Secrétaire général des Nations Unies pour le respect du cessez-le-feu mondial et de l’Accord Politique pour la Paix et la Réconciliation.  A cet égard, le projet de Code de Bonne de Conduite sur les élections donne à toute la classe politique les moyens de créer les conditions propices à la tenue d’élections crédibles et pacifiques. Nous exhortons, ensemble avec le Groupe des Etats partenaires et institutions internationales qui forment le G5, tous les candidats à signer et respecter ce Code de Bonne Conduite.   

Dans le même ordre d’idées, nous saluons l’adoption par l’Assemblée Nationale de la loi sur la liberté de la communication. Les Nations Unies ont encore une fois joué ici un rôle important en appuyant le Haut Conseil de la Communication dans la mise en œuvre du plan national de prévention de l’incitation à la haine et à la violence. 

Le rapport de la Division des Droits de l’homme de la MINUSCA sur l’incitation à la haine et à la violence en RCA, qui sera certainement partagé dans les heures qui viennent, arrive à point nommé pour sensibiliser les acteurs sur le danger de tels discours.

Je voudrais aussi profiter de cette commémoration pour saluer l’adoption de la loi N° 20-009 du 7 avril 2020 portant organisation et fonctionnement de la Commission Vérité, Justice, Réparation, Réconciliation, de la politique sectorielle de la justice et l’opérationnalisation de la Cour pénale spéciale.  Les Nations Unies se félicitent de ces pas positifs qui vont permettre de matérialiser la cohésion sociale, la lutte contre l’impunité et la réconciliation nationale.

Mesdames et Messieurs,

Je finirai par souligner qu’en cette veille d’élections, la célébration de la 72ème Journée des droits de l’homme nous rappelle que nous n’avons pas le droit de sacrifier ces attributs fondamentaux qui sont rattachés à notre humanité. La commémoration nous rappelle que nous avons un travail à faire, celui de renforcer les institutions, de les appuyer afin que leurs actions contribuent à la sacralisation de l’homme à travers le respect de sa liberté, de son bien-être et de sa vie paisible au sein de la communauté.

Je ne peux que me féliciter de cette ère nouvelle des droits de l’homme. Le respect et la protection des droits de l’homme ont amené, dans bien de pays, des régimes démocratiques et des alternances politiques. De fil en aiguille, une relation étroite s’établit entre la démocratie et le développement.

 

 Le combat pour les droits de l’homme n’est pas totalement gagné et demeure une lutte permanente. Les récents événements intervenus dans différents pays montrent que l’approfondissement de l’État de droit, garant des libertés fondamentales, n’a jamais été un processus linéaire. Debout et ensemble, nous pouvons et devons « Reconstruire en mieux ».

 

Je vous remercie.