Des pistes de solutions pour une transhumance transfrontalière apaisée et prospère dans la Vakaga

6 déc 2024

Des pistes de solutions pour une transhumance transfrontalière apaisée et prospère dans la Vakaga

Mamouda Tankoano

Les 4 et 5 novembre 2024, la ville de Birao, dans la préfecture de la Vakaga, a accueilli une conférence préfectorale sur la promotion d'une transhumance apaisée et prospère. Soixante participants, dont six femmes, venant des sous-préfectures de Ouanda-Djallé, Ridina, Tiringoulou et Am-Dafock, ont formulé des recommandations en faveur d'une coexistence pacifique entre éleveurs et agriculteurs ainsi que d'une amélioration de la sécurité dans la région. L’événement a bénéficié du soutien de plusieurs agences onusiennes et d’organisations non gouvernementales.

La transhumance représente un levier essentiel pour le développement socio-économique de la République centrafricaine et, en particulier, de la Vakaga. Cependant, dans certaines localités de la préfecture telles que Sikikédé, Am-Dafock, Aouk et Boromata, des conflits récurrents entre agriculteurs et éleveurs transhumants, souvent originaires du Soudan et du Tchad, nuisent à la cohésion sociale et à la coexistence pacifique. Selon Pari Mounra, de l’ONG Concordis, « ces conflits trouvent leur origine dans des problèmes tels que l'insuffisance et le non-respect des couloirs de transhumance, l'absence de parcs pastoraux organisés, le manque de contrôle aux frontières pour réguler les mouvements des éleveurs venus des pays voisins, ainsi que la dégradation et l'insuffisance des infrastructures pastorales, notamment les points d'eau ».

Amadou Moctar Diallo, chef par intérim du bureau de la MINUSCA, a exprimé l’espoir que cette conférence serve de tremplin pour l'élaboration de recommandations permettant de réduire significativement les conflits liés à la transhumance. En rappelant les conclusions de la conférence nationale sur la transhumance organisée en mai 2024 à Bangui, le préfet de la Vakaga, Jude Ngayoko, a souligné que le Président de la République centrafricaine et les partenaires, dont la MINUSCA, portent une attention particulière aux résultats de ces discussions, organisées dans toutes les préfectures du pays. « Cette conférence vise à garantir la bonne coexistence entre agriculteurs et éleveurs, gage d’une paix et d’un développement durable. (…) Je tiens à remercier la MINUSCA pour son appui constant aux autorités centrafricaines, conformément à son mandat », a-t-il déclaré.

Doungous Haroun, éleveur venu d’Am-Dafock, une localité située à 65 kilomètres de Birao, a exprimé sa satisfaction quant à la tenue de cette conférence, qui « a offert une plateforme pour exposer les difficultés rencontrées par notre communauté face aux éleveurs transhumants soudanais ». Fatimé Karama, agricultrice, a souhaité qu'un suivi soit mis en place pour garantir la mise en œuvre des recommandations formulées lors de cette conférence. Le Président de la Fédération nationale des éleveurs centrafricains (FNEC) de Birao, Mahamat Nour Chaibou, a quant à lui exprimé son désir de voir ce type de conférence se pérenniser. « Nous avons discuté des défis réels de la transhumance dans notre préfecture. Il le fallait au regard des conflits que nous avons dans certaines localités. La conférence nous a permis de formuler non seulement des recommandations fortes, mais aussi de renforcer nos capacités. Nous remercions la MINUSCA et souhaitons que ce genre de conférences se pérennise afin de consolider la paix dans la Vakaga », a-t-il affirmé.

Le marquage des couloirs de transhumance à l’aide de panneaux de signalisation a été recommandé, ainsi que le renforcement d’actions de sensibilisation pour encourager le respect de ces couloirs. La création de comités mixtes agriculteurs-éleveurs dans les sous-préfectures de la Vakaga a également été suggérée, de même que la construction de marchés à bétail, de points d’eau pour le bétail, et de pharmacies vétérinaires dans chaque sous-préfecture. Les participants ont également souhaité que les capacités des structures en charge des questions de transhumance soient renforcées et que les bureaux et logements des services concernés (tels que l’ACDA, l’Élevage, le Comité de transhumance et la FNEC) soient correctement équipés. Ils ont aussi suggéré que les associations locales puissent disposer des documents légaux encadrant la transhumance pacifique dans la région.

On note parmi les autres recommandations : la dotation de moyens de transport appropriés pour faciliter les déplacements des membres du Comité de transhumance, la poursuite de leur installation dans toutes les sous-préfectures de la Vakaga, la mise en place d’une culture d’indemnisation des agriculteurs dont les champs seraient endommagés. Enfin, il est préconisé d’interdire aux éleveurs transhumants de pratiquer des activités parallèles, comme la chasse, la cueillette ou la pêche, durant leurs déplacements, et de fournir aux forces de sécurité intérieure les ressources nécessaires pour assurer le respect des couloirs de transhumance.