Les Centrafricains élisent leurs représentants à l’Assemblée nationale

14 mar 2021

Les Centrafricains élisent leurs représentants à l’Assemblée nationale

Ghislaine ATTA

« A voté ! » s’écrie l’agent électoral du bureau No1 de l’école Lakouanga, en cette matinée du dimanche 14 mars 2021, lorsque Amir Abdoulaye venait de déposer son bulletin dans l’urne. Dans plusieurs centres de la capitale centrafricaine, à l’instar de ce centre de vote du 2e arrondissement de Bangui, le scrutin se déroule sans incident, avec une affluence relativement moyenne allant en augmentant.

Amir Abdoulaye, 36 ans et travailleur humanitaire, a tenu à être parmi les premiers à voter. Pour lui, exercer son « droit de citoyen » revêt une importance capitale. En effet, fait-il valoir : « J’ai voté pour la présidentielle. Aujourd’hui, je suis venu élire le représentant de mon arrondissement à l’Assemblée nationale (…) si vous ne votez pas aujourd'hui, demain, une personne que vous ne souhaitez pas voir vous représenter va décider à votre place. Et ce qu'elle risque de décider ne sera pas forcément ce que vous souhaitez ».

Le centre de vote de l’école Lakouanga, a ouvert depuis 6 heures et 55 minutes, a pu observer Lydiana Yerima, 24 ans, hôtelière et représentante d'un candidat dans le 2e arrondissement de Bangui. « J'ai assisté à l'ouverture du centre puis des bureaux de vote. C’est à 7 heures pile que le vote a démarré. Tout est calme pour l'heure, la sécurité est de mise », témoigne-t-elle.

Dans le 3e arrondissement de Bangui, à PK5, c’est la grande affluence à l’école primaire Koudoukou. Devant les bureaux de vote, les rangs qui s'étirent laissent voir des habitants enthousiastes venus accomplir leur devoir civique. Fait important, la présence de nombreuses femmes : jeunes, adultes, troisième âge… elles ont répondu présentes à l’appel à accomplir leur devoir de citoyennes. Christine Abourou, septuagénaire, dit voter « pour ses enfants ». En effet, estime-t-elle, ce sont eux qui ont l’énergie pour diriger et prendre les meilleures décisions, alors il convient de leur donner cette chance. « En tant que personne très âgée, je n’ai pas eu à faire la queue comme les autres, on m’a fait voter tout de suite », raconte la vieille dame.

Commerçante, Achetou Foto, la trentaine, attend pour sa part du prochain représentant du 3e arrondissement non seulement qu’il soit un artisan de cohésion sociale, mais aussi qu’il « s’occupe des mosquées, du marché et de réaliser toutes ces choses qu’il a promis de faire ».

D’une manière générale, relate le commissaire de l'Autorité nationale des Elections (ANE) chargé des opérations électorales, Richard Ngueret-Gbagba, « tout se passe bien ». En tournée à Bangui, et en contact permanent avec les responsables des démembrements déployés dans les autres préfectures, « j’échange avec eux afin de recueillir leurs besoins, indique-t-il. On m'a d'ailleurs relevé le cas d'un électeur muni d’un récépissé, à qui l'on avait refusé le vote. J'ai donné des instructions pour qu'il soit autorisé à accomplir son devoir ».

 De l’appui de la MINUSCA

 La MINUSCA continue, elle aussi, de jouer son rôle de partenaire du gouvernement conformément à son mandat d’appui au processus électoral. Des officiers électoraux sont présents dans chaque centre de vote afin de soutenir les opérations.

La Mission s’assure également du respect des droits des électeurs, grâce à un réseau d’officiers des droits de l'homme sillonnant les différents centres de vote à travers le pays, à l’instar de Cyr Bienvenu Takelepou. « Dans les droits de l'homme, il existe ce qu'on appelle les droits civils et politiques. Et dans le cadre des droits politiques, chacun a le droit de participer au processus électoral. C'est dans ce sens que nous sommes passés vérifier si effectivement chacun exerce librement ce droit de vote », dit-il. De façon concrète, le monitoring consiste à voir si les bureaux de vote sont équipés, les membres affectés dans chaque bureau de vote exercent librement leur rôle, les électeurs ont un accès facile aux bureaux de vote, les personnes qui ont besoin d'aide (handicapés, personnes âgées, femmes enceintes, etc.) la reçoivent effectivement, la liste électorale est disponible... En un mot, tout ce qui est nécessaire pour le bon déroulement du scrutin. « A la fin de l'opération, nous rendrons compte dans un rapport à l'intention de notre hiérarchie qui l'exploitera comme il se doit », fait savoir M. Takelepou.

« J’ai tenu, comme je l’avais fait le 27 décembre 2020, à faire le tour d’un certain nombre de centres de votes (…) Dans tous les centres que j’ai visité en mi-journée, la moitié des électeurs ont accompli leur droit de vote », s’est satisfait le Représentant spécial du Secrétaire général de l’ONU et chef de la MINUSCA, Mankeur Ndiaye, à l’issue d’une tournée qui l’a mené dans plusieurs centres de votes à Bangui. Le Chef de la mission de l’ONU a toutefois tenu à « préciser que la MINUSCA contribue à la sécurisation des élections. Elle n’en est pas responsable, mais elle y contribue. Il est également important de préciser que la MINUSCA n’organise pas les élections. C’est l’Etat centrafricain qui les organise à travers l’Autorité nationale des Elections (ANE), et nous, nous apportons notre appui comme le Conseil de Sécurité nous l’a demandé dans le cadre de notre mandat contenu dans la résolution 2552 du 12 novembre 2020. »

Le Conseil demande, en effet, à la MINUSCA d’apporter un appui aux autorités nationales centrafricaines pour l’organisation d’élections libres, démocratiques, transparentes. « Un appui aux plans matériel, technique, logistique, sécuritaire. C’est ce que nous avons commencé à faire depuis le début de la cartographie électorale jusqu’à ce jour. Nous avons mobilisé toutes nos capacités, toutes nos forces y compris les réserves dont nous disposions à Bangui, pour couvrir le maximum de territoire possible », a, en outre, fait valoir le Représentant spécial, se félicitant par la même occasion de la « belle coopération » entre la MINUSCA et les forces nationales de défense et de sécurité.

Evoquant les défis sécuritaires notamment dans quelques localités en province, le Chef de la MINUSCA a indiqué qu’« au départ, la stratégie de la CPC était d’empêcher la tenue du scrutin, mais le vote s’est déroulé. Ils tirent des coups de feus afin d’obliger les populations à se terrer chez elles. Mais nous faisons notre maximum pour que le vote se déroule ». Car, l’objectif essentiel est d’éviter tout vide parlementaire.

« Tout le monde joue son rôle », s’est enfin réjouie la Représentante spéciale adjointe du Secrétaire général des Nations Unies, Denise Brown, en charge des élections. « Le contexte a changé depuis décembre. Comme vous le voyez, la situation est très calme. Les bureaux de vote de Bangui et dans les régions sont ouverts, et le matériel et les agents sont en place (…) Nous sommes rassurés et nous voulons féliciter la population qui vient exprimer son souhait, ainsi que les institutions qui viennent pour s'assurer que les choses se passent correctement et que les procédures sont suivies », a-t-elle conclu.

Actualité sanitaire oblige, le dispositif anti COVID-19 est bien présent dans les différents bureaux de vote.