Mieux comprendre le processus de désarmement démobilisation et réinsertion (DDR) en RCA

7 jan 2016

Mieux comprendre le processus de désarmement démobilisation et réinsertion (DDR) en RCA

 
L’accord de Désarmement, de démobilisation et de réinsertion (DDR) a été rendu possible grâce au forum de Bangui tenu du 4 au 11 mai 2015. Cet accord signé entre neuf groupes armés et le Ministère de la Défense a été vite perçu comme un passage obligé vers le règlement de la crise centrafricaine. Il engage chaque groupe à cesser immédiatement la lutte armée, à prévoir le regroupement dans un bref délai des combattants dans différents sites.  Il sera ensuite envisagé leur prise en charge par le gouvernement avec l’appui de ses partenaires. Pour mieux comprendre les détails de ce concept et l’importance qu’il revêt dans le dénouement de la crise centrafricaine, le Bureau de la communication et de l’information publique (BCIP) de la MINUSCA s’est rapprochée du Chef de la section DDR de la MINUSCA, Khaled Ibrahim, qui dresse ici l’état des lieux sur la question et apporte davantage de clarifications sur le processus devant conduire au désarmement, à la démobilisation et à la réinsertion des ex-combattants en RCA.
BCIP : Bonjour M. Ibrahim, en votre qualité de chef de la section DDR de la MINUSCA, pouvez-vous nous dire ce que l’on peut comprendre par Pré-DDR ? 
Khaled Ibrahim : Le pré-DDR se définit comme une phase préparatoire destinée à offrir des alternatives à la violence aux combattants des groupes armés après la signature de l’Accord sur le désarmement, démobilisation, réintégration et rapatriement (DDRR)  obtenu lors du Forum de Bangui. Mais les conditions d’un programme efficient de DDR n’étant pas encore réunies, l’on a pensé à une formule pré-DDR qui s’adapte mieux aux conditions actuelles de la RCA.
Alors, comment ce programme est-il mis en œuvre ? Et quelles sont les conditions pour y être éligible?
K.I : Le pré-DDR est une réponse au prescrit de l’article 4 de l’accord DDR qui dispose que : « tous les combattants et éléments armés signataires de l’Accord DDR doivent être regroupés dans un délai raisonnable sous réserve de mobilisation des ressources sur les sites à convenir. Pendant cette période, le gouvernement assurera la prise en charge avec l’appui des partenaires ; les combattants seront sensibilisés, identifiés, regroupés et désarmées ». La MINUSCA a donc pris la responsabilité d’appuyer le gouvernement et de l’aider à la mise en application de l’article 4 de l’Accord DDR. La prise en charge des combattants se fera sous forme d’appui direct en vivres et en participation rémunérée à  des projets d’intérêt communautaire tels que les Travaux à Haute Intensité de Main d’œuvre (THIMO). Les conditions de participation sont celles convenues par les partenaires à l’Accord, à savoir :
Ø Etre membre d’un groupe armé signataire ;
Ø Accepter de déposer les armes et s’inscrire dans la logique de paix.
L’opération a-t-elle déjà commencé?
KI : Le pré-DDR a d’abord commencé à Bangui depuis décembre 2013, notamment avec la prise en charge des éléments ex-Seleka regroupés dans les trois camps BEAL, BSS et RDOT par la fourniture de vivres. Cette action a ensuite permis la dépollution, initiée depuis Juin 2015, de plus de six tonnes de munitions, éloignant ainsi un énorme danger sécuritaire qui pesait sur la capitale. Ce processus de dépollution se poursuit toujours. Les opérations pré-DDR se sont ensuite étendues à plusieurs préfectures depuis le mois d’octobre 2015. Ils sont actuellement en cours à Bria, Bambari, Bouar, Birao et Kaga-Bandoro. Nous prévoyons couvrir tout le territoire en ciblant les zones avec une présence significative de combattants.
Qui est concerné par cette opération? Combien de temps va-t-elle durer ?
KI : Tous les combattants des groupes armés qui adhèrent aux principes du pré-DDR et s’engagent à déposer les armes. Dans les localités où des menaces sécuritaires subsistent, des aménagements seront faits pour offrir une certaine flexibilité dans la mise en œuvre du projet. 
KI : Et cette phase de pré-DDR va durer longtemps ?
Le pré-DDR reste un projet limité dans le temps et s’arrêtera dès que les conditions pour lancer le DDR seront en place.
KI : Pourtant l’on suppose que la mise en œuvre du Pré-DDR suit des étapes bien définies, ce qui a priori devrait être circonscrit dans le temps ! 
KI : En effet. Et ces étapes se résument à quatre moments  principaux, au nombre desquels figure l’Accord DDR dument signé par les parties en conflit ; s’en est suivie  la décision de la MINUSCA de soutenir le gouvernement en dégageant des fonds sur son budget propre.  L’élaboration du concept pré-DDR et son opérationnalisation représente une autre étape. Enfin, une large campagne de sensibilisation conduite par la MINUSCA, de concert avec le gouvernement et les groupes armés dans les différentes préfectures ciblées par le projet. 
Que répondez-vous à ceux que se demandent pourquoi le Pré-DDR et non pas directement le DDR ?
KI : Ce choix a été a fait pour la simple raison que toutes les conditions pour lancer un DDR ne sont pas encore réunies. Le DDR, faut-il le rappeler, est conditionné par l’élaboration d’un programme, avec la participation de tous les partenaires, lequel devra être adopté par le gouvernement. A cet effet, il convient de souligner que la MINUSCA a déjà transmis au gouvernement un projet de document de programme DDR ; mais celui-ci n’a pas encore fait l’objet de discussion et, par voie de conséquence, n’est pas encore adopté. Le DDR étant un programme très sensible, l’adoption attendra très probablement la mise en place du gouvernement issu des élections. 
La mise en œuvre du Pré-DDR, on le sait, implique plusieurs acteurs. Qui sont-ils et rôle joue chacun de ces acteurs? 
KI : Le Gouvernement a la responsabilité institutionnelle et la coordination globale du processus de DDR. Quant à la MINUSCA, elle assure le financement, l’assistance technique et logistique, ainsi que la coordination de l’opération. Pour le volet exécution, la Mission a pour partenaire le Bureau des Nations Unies pour les services d'appui aux projets (UNOPS). Enfin, les Groupes Armés appuient l’action de sensibilisation, participent à la mobilisation des combattants, et prennent part aux comités locaux de coordination.
 
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